Shéhérazade raconte tous les soirs des histoires au roi. Des histoires qu'elle a regroupées du fond de l'Egypte, mais qui sont riches en morale. Aujourd'hui, elle raconte l'histoire d’une fleur rouge avec une tige verte.
Il était une fois un enfant très jeune. Ses parents l’adoraient, le choyaient, le dorlotaient tellement, il était calme et doux. C’était un enfant exemplaire qui n’aimait pas gêner les autres. Il cherchait toujours à adopter un comportement exemplaire. Sa famille l’aimait beaucoup et il se sentait tout le temps couvé. Ayant atteint l’âge de la scolarité, ses parents décident de l’envoyer à l’école du village. L’enfant était tout ému de partir à l’école. Le premier jour, il y va avec beaucoup de joie et d’enthousiasme. Il souhaite être la source de la fierté de ses parents. Ainsi, est-il arrivé bien habillé, parfumé et préparé pour l’occasion. Dès que la maîtresse arrive avec sa grande robe bleue, il se sentit en face d’une déesse grecque à qui il devait respect et vénération. Comme tous les autres mômes, il s’installa sur le pupitre et attendait avec impatience de découvrir ce nouveau monde mystérieux. D’une voix grave, la maîtresse de classe a dit : « C’est aujourd’hui, votre premier jour. Aujourd’hui, nous allons dessiner ». L’enfant se dit alors : « C’est chouette. J’adore dessiner et en plus, je le fais bien ». Devant lui, il y avait une pile de feuilles blanches et des crayons couleurs, il a alors pris une feuille, a commencé à dessiner un arbre. Son acte artistique a été interrompu par la voix de l’enseignante qui a dit : « Vous allez tous dessiner une fleur. Vous comprenez bien la consigne ? » Le mot « consigne » l’arrêta au beau milieu de son acte. Il y avait donc une consigne qu’il fallait respecter. L’enfant ne voulait pas paraître ridicule, il déchira le premier papier et s’en servit d’un autre. Il pensait déjà à dessiner une fleur multicolore comme l’arc-en-ciel dans les jours où le soleil se lève après la pluie. Il choisit avec finesse les couleurs du pot qui se dressait devant lui. Sa rêverie a été encore une fois interrompue par l’enseignante qui disait d’une voix ferme et incontestable : « Vous allez dessiner une grande fleur rouge avec une tige verte ». A partir de ce jour, l’enfant a appris à attendre toujours la consigne. Sans consigne rien à exécuter. Il ne voulait pas se ridiculiser au milieu de la classe, décevoir ses parents et sa maîtresse. Une année s’est écoulée et l’enfant s’est habitué au rythme de l’école. Mais, les parents devaient partir vivre dans une ville plus grande que ce petit village.
Le premier jour, l’enfant arrive à l’école. Il est surtout ému par l’école plus grande, les lieux plus vastes, le plus grand nombre d’enfants. La maîtresse, elle aussi, est différente. Elle ne portait pas une grande robe bleue, mais une robe rose avec des fleurs multicolores, comme les fleurs qu’il aurait aimé dessiner dans le passé. Installé sur son banc, l’enfant attend que l’enseignante leur donne du travail. Souriante, sur un ton très léger : « Aujourd’hui, c’est le premier jour. On doit tous faire connaissance. Pourquoi chaque enfant ne dessine quelque chose qui le représente. Moi, aussi, je vais dessiner un dessin et comme ça, nous ferons connaissance ». L’enfant reste calme, il ne bouge pas, il ne comprend rien. Il se dit : « Où est la consigne ? » L’enseignante le remarque et lui dit : « Mon enfant, pourquoi ne dessines-tu rien ? » L’enfant lui répond : « Mais, vous n’avez pas précisé la consigne ? » Souriante, l’enseignante lui dit sur un ton consolant : «Dessine ce que tu veux, ce qui te plaît. Tu es libre. Dessiner n’a pas besoin de consignes. Dessiner doit suivre les élans du cœur ». Confus en l’absence de consigne, l’enfant a pris ses couleurs et a tracé machinalement sur son bout de papier une grande fleur rouge avec une tige verte. Les élans de son cœur étaient déjà morts derrière la grande montagne de consignes et de règles.